Karaté

Bruno m’attrapa par les deux pans de mon kimono. Il m’attira une première fois lentement vers lui, décortiquant les mouvements pour les autres stagiaires qui faisaient cercle autour de nous.
J’étais la dernière à passer pour une démo. J’avais presque cru y échapper. Je me sentais dans une espèce de torpeur après ces trois jours intenses de stage. Mon corps était fourbu et je peinais à garder mon esprit concentré.
Il me garda un long moment contre lui. L’odeur de sa sueur m’envahit, pour m’affoler l’espace d’un instant, venant me tirer de mon engourdissement.
Bruno répéta le mouvement plusieurs fois. L’anticipation de mon corps se rapprochant du sien, du parfum de l’effort qui me troublait encore et encore, ne faisaient qu’aiguiser mes sens.
J’étais dans un état second quand il me saisit, me fit rouler sur son épaule et me projeta au sol. Le bruit de mon corps frappant le tatami me tira momentanément de ma léthargie.
Je le vis sportivement me tendre une main pour me relever, mais je n’eus d’yeux que pour les dents blanches qui ensoleillaient son sourire.
Je voyais ses lèvres comme dans un film au ralenti, articuler qu’il allait remontrer l’enchaînement, et un picotement me traversa le corps de la tête au sexe, ma colonne vertébrale servant de gaine à cet éclair de désir.
Nous nous remimes debout, mon excitation était sans doute passée incognito. Au moment de remontrer l’enchaînement depuis le début, nos regards se croisèrent franchement pour la première fois. Ses longs cils encadraient un regard profond et brillant dans lequel je lus sans peine que le trouble était partagé.
Sa main enserra mon poignet à même la peau, alors qu’auparavant il n’avait saisi que le tissu légèrement râpeux de ma veste. Je sentis sa force, sa fermeté à me maintenir contre lui.
Quand il me releva après la projection, ses lèvres étaient entrouvertes, comme une invitation déjà à y glisser ma langue.
Je refis l’exercice avec d’autres stagiaires. D’où qu’il soit dans le dojo, je sentais le regard de Bruno jamais loin, dans ce que je m’imaginais déjà être comme une caresse.
Le stage se clôtura par un petit verre que nous partageâmes avant que chacun regagne le vestiaire, Bruno restant le dernier dans la salle afin d’effectuer quelques rangements.
Les deux autres femmes de la session s’étaient éclipsées rapidement, alors que je tentais encore de dissiper mes émotions sous une douche brûlante.
Une fois encore lors de cette soirée, le temps sembla s’étirer au point d’être au bord de l’arrêt.
Je ne sais combien de temps je restai à offrir ma peau à la brûlure de l’eau et à la moiteur de la minuscule cabine de douche.Soudain, un air froid s’y engouffra et mon poignet retrouva la prise puissante de Bruno qui venait d’entrer. Il était toujours en kimono. En un instant, le tissu se gorgea d’eau. J’entends encore le bruit lourd de sa veste tombant sur le carrelage dans un éclat de gouttelettes annonciatrices d’un ouragan sensoriel. À peine rentré, à peine mouillé, à peine nu, il me souleva pour m’emmener hors des vestiaires et retourner dans la salle de cours désormais déserte.
Il me déposa au centre du dojo, nue face au miroir et s’écarta de moi. Il se mit à me tourner autour, à bonne distance. Sa musculature longue, que le kimono m’avait toujours caché jusqu’alors, brillait sous les gouttes d’eau qui le recouvraient encore.
Inversant les rôles, je saisis à mon tour fermement son poignet et le pris comme partenaire d’une tout autre démonstration. Il se laissa souplement rouler par-dessus mon épaule, puis m’entraina vigoureusement dans sa chute.
Nous nous retrouvâmes au tapis, nos deux épidermes toujours humides se frottant dans un préliminaire des plus affolants.
Les urakens répétés de ses hanches contre les miennes réduisirent au minimum la distance entre nous.
Quand notre orgasme commun fit irruption, nos corps étaient secs de l’eau propre de la douche, mais trempés de la chaleur de nos désirs conjoints.