Zen

Durée: 7 min 04 sec
© Dans tous les sens
Lien musical: Musique Relaxante – Méditation, Dormir et Berceuse

Catégories : ,

Description

Zen

 

« Concentre-toi sur ta respiration ! » se disait la femme. « Concentre-toi sur ta respiration. »

Mais comment faire ? Ils étaient tous devant elle, au premier et deuxième rang, et leurs anatomies moulées de lycra et autres cotons près du corps se reflétaient comme à l’infini dans les miroirs de la salle.

« Concentre-toi sur ta respiration ! » se disait la femme. « Concentre-toi sur ta respiration. »

Chaque mouvement de la séance de zen shiatsu lui offrait un autre angle de vue sur tous les participants de ce cours auquel, fou qu’il était lui-même, son psy lui avait conseillé d’assister, afin, disait-il, d’évacuer les tensions accumulées au bureau.

Depuis trois semaines, chaque lundi soir à 18h, elle gravissait le sombre escalier sentant l’humidité qui l’amenait plus haut dans ce paradis présumé de la relaxation.

Associer respiration, mouvements en conscience, relaxation ….voilà le cocktail magique qui était censé la faire quitter l’agitation mentale de son récent burn out, pour l’amener vers l’état de grâce de la sérénité promise.

« Concentre-toi sur ta respiration ! » se disait la femme. « Concentre-toi sur ta respiration. »

D’abord séduite par la jolie ambiance du lieu, que des tentures violettes aux extrémités des miroirs, des coussins confortables disséminés çà et là et un parfum d’encens flottant dans l’air rendaient fort agréable, elle avait cependant rapidement saisi quels seraient les prétextes nombreux à une déconcentration absolue.

Elle était la seule participante femelle à ce cours astucieusement nommé « Managez votre surmenage ». La responsable du groupe l’en avait avertie par téléphone. La situation ne l’avait pas à priori dérangée, mais elle n’avait aucunement pensé que cet état de fait se transformerait rapidement en état de fesses.

« Concentre-toi sur ta respiration ! » se disait la femme. « Concentre-toi sur ta respiration. »

Lors de la première séance, chacun s’était brièvement présenté. La femme n’avait pas spécialement repéré d’élément « perturbateur » dans le groupe. Après ce bref tour de prénoms, dont elle n’en avait bien évidemment retenu aucun, l’activité à proprement parler avait débuté.

Chacun et l’unique chacune avait saisi un des tapis de caoutchouc entassés au fond de la salle, pour venir s’y asseoir face au miroir en un lotus que sa souplesse lui permettait.

Elle s’était mise au dernier rang, derrière deux lignées de virilité. Elle n’était agie d’aucune volonté de voyeurisme (du moins pas à la première leçon), mais plutôt d’une certaine gêne à se montrer comme seul femme parmi toutes ces hommes qu’elle imaginait déjà tous fort habiles à l’exercice.

La première série de postures s’exécutait assis en tailleur et ne lui avait posé que quelques problèmes de raideur de ses membres inférieurs. Elle était alors bien concentrée sur la tâche, et toute décidée à évacuer de son mental ses ruminations professionnelles récurrentes.

« Concentre-toi sur ta respiration ! » se disait la femme. « Concentre-toi sur ta respiration. »

La seconde série avait vu tout le joyeux groupe se lever, puis, se pencher en avant à plusieurs reprises en soufflant très lentement.

Lorsqu’elle entreprit sa première descente, c’est coupé que fut le souffle de de cette relaxo-apprentie. En un seul mouvement, son œil venait d’embrasser une dizaine de paires de fesses, des plus frêles au plus musclées, capable de satisfaire tous les goûts féminins possibles.

Elle avait fermé les yeux un instant, désireuse de se reprendre, désireuse de se concentrer sur son processus de digestion mentale et sur l’accalmie de sa psyché.

Mais l’instant d’après, elle les avait rouverts. Et une kyrielle de pensées toutes plus tordues les unes que les autres avec immédiatement envahi son esprit.

Aaah poser mes mains sur ce collant noir moiré et pétrir vigoureusement la chair. Appuyer doucement mon index sur chaque petit carré de ce legging noir et blanc. Descendre langoureusement les paumes de mes mains de cette ceinture jaune fluo jusqu’au bas des jambes, là où quelques centimètres d’une peau caramel et poilue juste ce qu’il fallait semblait lui lancer une invitation à la caresse.

« Concentre-toi sur ta respiration ! » se disait la femme. « Concentre-toi sur ta respiration. »

La dernière série consistait en une suite de mouvements très lents, couchée sur le dos. Il aurait fallu regarder le plafond, ou ne faire que les exercices l’amenant à tourner la tête sur la gauche. Or, dans un souci évident de latéralisation, chaque mouvement se faisait à droite et à gauche. Et quand sa tête se tournait vers la droite, elle ne pouvait échapper à ce paysage vallonné çà et là de sexes et de torses.

Les voir inspirer lui coupait le souffle. Les voir s’étirer marquait leurs protubérance et affolait son rythme cardiaque. Les entendre expirer la faisait frissonner.

Elle avait à ce moment-là abandonné toute idée de se concentrer sur sa respiration. Elle avait au contraire passer les sept autres sessions à se rincer l’œil, ce qui s’était avéré au final un excellent moyen de se vider la tête en s’en mettant plein les mirettes …..

Avis

Il n’y a pas encore d’avis.

Soyez le premier à laisser votre avis sur “Zen”

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *